D’origine chilienne, Alfredo Jaar regarde le monde depuis New York. Représentant du Chili à la Biennale de Venise de cette année, il dévoile en Arles son univers démentiel qui interroge les génocides. 

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Courtesy of the Museum of Modern Art, New York and Lousiana Museum of Modern Art, Humlebæk, Denmark.

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Courtesy of the artist and Galerie Thomas Schulte, Berlin.

Né en 1956 à Santiago du Chili. Vit et travaille à New york.

LA POLITIQUE DES IMAGES
Alfredo Jaar semble être un invité sur mesure pour Arles. Une grande partie de son travail consiste à interroger la photographie dans son rôle de témoin journalistique prétendument objectif. À travers des installations, des projections, l’accumulation de documents qui convergent vers un message que le visiteur découvre progressivement, physiquement souvent, Alfredo Jaar bouscule nos éventuelles certitudes sur la vérité de l’image, les bonnes intentions de la presse, le point de vue occidental sur les événements. Ses obsessions sont celles d’un chilien, fortement imprégné de culture française, dont la famille a été poussée à l’exil par la dictature, et qui regarde désormais le monde depuis New york. Dès les années 80, il a très consciemment voulu être l’artiste qui ramènerait les convulsions de l’hémisphère sud au centre de l’art contemporain, alors plus préoccupé par son auto-narration et par le « street art », et de moins en moins tourné vers la solidarité internationale qui avait animé les années d’après guerre. Architecte, il maitrise l’espace et entraine le visiteur dans de brèves performances dont il devient acteur. Alfredo Jaar nous piège souvent dans un flagrant délit de percetion trop superficielle des images. Pour les Rencontres nous avons voulu rassembler les pièces les plus importantes dialoguant avec la photographie. Elles évoquent la dictature chilienne, le rapport de la presse américaine à l’Afrique, le génocide rwandais, la traque de Ben Laden, des héroïnes des Droits de l’homme… Un tel ensemble d’œuvres d’Alfredo Jaar est une première en France et elle occupe toute l’église des frères Prêcheurs.”
François Hébel

www.alfredojaar.net
Exposition coproduite par les Rencontres d’Arles et marseille-Provence 2013.
Exposition organisée en collaboration avec le Studio Alfredo Jaar, la galerie Kamel mennour, Paris, la galerie Oliva Arauna, madrid, la galerie thomas Schulte, berlin et le Louisiana museum of modern Art, Humlebæk, danemark.
Exposition présentée à l’église des frères Prêcheurs.

INTENSE PROXIMITÉ

Le travail d’Alfredo Jaar, artiste, architecte et réalisateur, interroge les médias et l’usage qu’ils font des événements, notamment l’atrocité des guerres. Que ce soit par l’intervention ou le documentaire, l’artiste interroge la tension entre désir de connaissance et nécessité d’action. Son vocabulaire artistique est composé de courts textes, d’images partiellement montrées ou «autocensurées». Il utilise la lumière du flash photographique comme outil critique révélant des situations éphémères.

Son installation May 1, 2011 est inspirée de l’action du commando américain qui a tué Oussama Ben Laden au Pakistan, sous les regards du président Barak Obama et de l’équipe des responsables civiles et militaires des États-Unis. L’artiste utilise une photographie officielle et visiblement l’image a été retouchée. Les détails de l’opération ont été transmis en direct à la Maison Blanche par des caméras installées dans l’équipement des agents participants à cette « capture ». Aucune trace du corps de Ben Laden et aucune image de lui n’ont été montrées dans les médias. Cette installation est composée de deux écrans et de deux dessins: un écran montre l’image des responsables militaires, de la ministre des Affaire étrangères, Hillary Clinton, et du président Obama, tandis qu’un deuxième écran reste blanc, à l’image de cette action présentée comme réelle mais sans image officielle. Alfredo Jaar travaille autant sur la grande histoire, que sur la mémoire d’anonymes, interrogeant le micro-événement qui peut mener à la catastrophe.

Le Siècle de Lévi-Strauss (2007) est un tirage à jet d’encre, de la une du journal Libération avec le portrait de Claude Lévi-Strauss, à côté duquel l’artiste pose un point d’interrogation en néon. Courtesy Rencontres d’Arles 2013.