Danh Vo vient de représenter brillamment le Danemark à la Biennale de Venise tout en étant choisi par François Pinault pour mettre en scène sa collection à la Punta della Dogana. Il offre à Paris une vision infinie avec la pose de quatre miroir où le visiteur se retrouve ou se perd ? 


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Danh Võ, Take My Breath Away, Exhibition view, Photo credits: Florian Kleinefenn
Courtesy of the artist and Galerie Chantal Crousel, Paris.

 

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Danh Võ, Take My Breath Away, 2015, Mirrors engraved by Phung Võ – Lyrics from Fabulous Muscles (2004) by Xiu Xiu – 24 black and white photogravures on paper of Dr. Joseph M. Carrier (1962 – 1973) – Dimensions : 36m2 / 57m2 with structure – 3 meters high – 23 mirrors 300 x 100 cm each – Dimensions variables

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Danh Võ, Take My Breath Away, Exhibition view, Photo credits: Florian Kleinefenn
Courtesy of the artist and Galerie Chantal Crousel, Paris.

40 ans seulement et donc une double consécration pour ce jeune artiste danois d’origine vietnamienne qui a déjà coupé en mille morceaux la statue de la Liberté au Musée d’art moderne de la ville de Paris et dans le monde, même dans un jardin public new-yorkais. Ce travail gigantesque de trois ans a consacré l’artiste qui depuis sème ses oeuvres d’une élégance et d’une force magnifiques où se déploient des lustres, de l’or, des miroirs, des bouquets de fleurs d’une poésie à couper le souffle. Prix Hugo Boss en 2012 aux USA, exposé dans les plus grands musées depuis 2011, dans les collections du Centre Pompidou, de la Tate de Londres, du MoMA de New York, Danh Vo déploie une oeuvre rare et politique, comme un cri d’une beauté folle et désespérée.

A la galerie Chantal Crousel, ce sont des histoires d’amour qui se jouent entre quatre miroirs. Comme il en a l’habitude, l’artiste prend, greffe et mélange des histoires à l’Histoire pour inventer un nouveau récit d’une force unique en son genre. Si douce et si violente à la fois. Ici, tout part de photographies qu’un homme lui a donné un jour à Los Angeles. “Il tient à me remettre des photographies qu’il a prises quand il était en poste au Vietnam, entre 1962 et 1967”, explique Danh Vo. Dans ses images, des hommes. Des caresses. Des frôlements. Juste, à peine. “Une sensualité gay impossible à afficher à l’époque où Joseph Carrier les a capturées”. Et nous voilà placés dans une sorte de chambre composée de miroirs où l’on se regarde à l’infini. Certaines des photos sont accrochées sur les miroirs, ailleurs des inscriptions du titre de la chanson “Fabulous Muscles” de 2004. Ici tout glisse et se superpose. Tout se croise pour donner à voir dans l’infini de la délicatesse, l’amour et le désir amoureux. Entre hommes. Entre tous.

Itinéraire de l’artiste par la commissaire de son exposition au Musée d’art Moderne de la ville de Paris en 2013, Angeline Scherf.

« Je ne veux pas finir sans vous mettre encore une fois en garde contre l’enthousiasme ou la jalousie que vous inspirent mes « chances », et plus précisément celle de pouvoir me prélasser dans une ville dont le souvenir vous hante sans doute, malgré votre enracinement dans notre patrie évaporée. Cette ville, que je n’échangerais contre aucune au monde, est pour cette raison même la source de mes malheurs. Tout ce qui n’est pas Paris se valant à mes yeux, il m’advient souvent de regretter que la guerre l’ait épargnée, et qu’elle n’ait pas péri, comme tant d’autres cités. Détruite, elle m’eût débarrassé du bonheur d’y vivre, j’aurais pu passer mes jours ailleurs, au fin fond de n’importe quel continent. Je ne pardonnerai jamais à Paris de m’avoir lié à l’espace, ni d’être à cause d’elle de quelque part. Ceci dit, je n’oublie à aucun instant que ses habitants, les quatre cinquièmes, notait déjà Chamfort, « meurent de chagrin ». J’ajouterai encore, pour votre édification, que le reste, les rares privilégiés dont je suis, ne s’en émeuvent pas autrement, et qu’ils envient même à la grosse majorité l’avantage qu’elle a de savoir de quoi mourir. »

Extrait de «Lettre à un ami lointain», in Histoire et utopie, E.M.Cioran

Danh Võ, Take My Breath Away, galerie Chantal Crousel, 10, rue Charlot, 75003 Paris. Tél. : 01 42 77 38 87.

Du 22/10 au 19/12/15.