Ils sont nés dans les années 1980 et ont grandi en plein boom économique chinois. Ils peignent la figure… Une peinture qui se libère des critiques sociales pour se concentrer sur l’individu.
Nés dans les années ’80, ces artistes ont grandi en plein boom économique et ils n’ont pas connu de façon directe les évènements marquants de la Révolution Culturelle. Leur démarche s’éloigne de celle de l’Avant–Garde des années ’90 et du mouvement connu sous le nom de Réalisme Cynique qui visait à revisiter avec un humour tranchant les piliers de l’histoire socio-politique de la Chine du XXème siècle.
Leur art se libère de fait de toute critique sociale et se tourne vers l’individu.
Les peintures présentées révèlent une nouvelle approche de la figuration, employée pour traduire une réflexion introspective et mettre en lumière des interrogations psychologiques. Les portraits ou les scènes d’intérieur dépouillées de toute présence humaine traduisent une nature mélan- colique, un sentiment d’insatisfaction et parfois même des tensions presque ‘palpables’.
Avec son style distinct, chaque artiste laisse libre cours à son inconscient pour témoigner des angoisses et des peurs générées par les métamor- phoses du territoire, les changements brutaux de modes de vie, inexorablement influencés par la culture occidentale.
Dans leurs travaux, l’illusion et les références oniriques sont récurrentes : derrière une apparente normalité se cache souvent un sentiment de malaise.
C’est ainsi que l’œuvre du peintre et vidéaste Wang Haiyang, porte sur les états du subconscient et explore ses relations des plus tortueuses avec ses désirs. Ses personnages très kafkaïens font face à une mutation dérangeante qui symbolise la recherche d’identité et les sentiments de solitude et doute que cette quête comporte.
Dans les œuvres de Yan Heng, nous retrouvons les exigences du nouvel ‘académisme’ chinois, centré sur le corps et l’expérimentation. Ce dernier tend à associer fausses apparences et réalités pour créer des formes visuelles organiques et perméables. Opposant la Chine d’hier et celle d’aujourd’hui, Heng mêle dans ses compositions les références à un passé qu’il n’a pas nécessairement connu et celles du présent. En les superposant sur la toile, l’artiste donne l’impression de réalités parallèles. Toutes ces références éparses forment autant d’oppositions et de tensions entre l’ordre relatif du passé et le chaos anticipé de la société de consommation actuelle.
Caractérisées par une lumière évanescente les toiles de Ma Sibo nous donnent à voir des fragments de paysages intimes complètement in- habités. Les jeux de lumière et de flou, obtenus grâce à un étonnant travail de la matière en dégradé, confèrent aux scènes et aux espaces du quotidien un effet troublant d’étrangeté.
La forêt avec sa forte charge symbolique est un des sujets de prédilection des larges peintures de Zhu Xinyu. Réalisées avec une gamme de couleurs pâles et baignées d’une lumière éthérée, ses arbres envoutant semblent cacher un élément surnaturel. La forêt est par antonomase un lieu capable de brouiller les oppositions évoquant la parenté entre les ténèbres et la lumière, le corps et l’âme…
Les œuvres de Site Fu présentent des scènes oniriques – proches de l’illusion ou du rêve – composées à partir d’éléments de la vie quotidienne subtilement modifiés. Le tableau apparaît comme un arrêt sur image mais semble offrir des possibilités infinies. Temps arrêté, suspense, mystère ou encore malaise jouent un rôle essentiel dans la reconstruction de ces ambiances surréalistes.
Utilisant une palette minimale et un coup de pinceau soigné, Sun Yu représente des personnages tourmentés qui semblent être à la recherche du sens de leur propre existence. Les expressions des visages nous renvoient à sentiment d’aliénation et d’inquiétude.
L’exposition est l’occasion de découvrir les différentes facettes de cette nouvelle figuration où l’étrange et le fantasque sont à l’ordre du jour. Les œuvres présentées constituent aussi un témoignage original des formidables transformations à l’œuvre en Chine et des interrogations individu- elles qu’elles peuvent susciter.
“Don’t look back… Site Fu / Ma Sibo / Sun Yu / Wang Haiyang / Yan Heng / Zhu Xinyu”. Exposition Collective de Peinture. Galerie Paris Beijing Hôtel Winssinger, rue de l’Hôtel des Monnaies 66 – 1060 du 12 Du 12/06 au 13/09/14.
(Images de haut en bas de la page, Sun Yu, Five Elements, Water poisoning, 2012, oil on canvas; Site Fu, Lit, L’Homme Dans La Fumée, 2013, mixed media on paper; Zhu Xinyu, Turbid Landscape, 2014, oil on canvas, Ma Sibo; Interiors 04, Neon at Midnight 2010, oil on canvas; Wang Haiyang, Untitled 22, 2010, Pastel on paper, courtesy galerie Paris-Beijing, Bruxelles)