En 2008, Bernar Venet nous accordait un entretien passionnant où il raconte toute son aventure et sa consécration newyorkaise, comme son passage de l’abstraction mathématique à l’acier.
“J’ai un souvenir très précis de mon enfance. J’ai commencé très tôt. Lorsque j’avais 11 ans. J’habitais un petit village perdu qui n’est même pas sur la carte de France ! Un jour ma mère m’a emmené prendre le bus pour aller à Dignes acheter des couleurs chez un marchand qui vendait de la peinture à l’huile.
J’ai vu dans la vitrine un livre énorme que je possède toujours. Il y avait un tableau reproduit sur la couverture et dessus un mot totalement abstrait pour moi : il y avait marqué « Re-noir », explique Bernar Venet en marquant les syllabes. Je vais demander au vendeur qui est Renoir et il me dit que c’est un très grand peintre, un artiste que l’on trouve dans tous les musées du monde et dont les tableaux valent très chers. Et il me sort un autre livre encore plus impressionnant que le premier pour me l’expliquer. Ce jour là j’ai compris que je voulais devenir artiste. Il faut dire que mon grand père, mon père, mes frères allaient tous travailler comme tout le village à l’usine Pechiney…Nous vivions dans une cité ouvrière Pechiney. Ce jour là je me suis dit que peut-être j’allais m’en sortir. Vous savez, je n’étais pas très doué à l’école dans les matières académiques. Mais je me suis aperçu qu’en dessin j’avais toujours la meilleure note. Et je voyais le regard un peu émerveillé de l’instituteur devant mon travail. C’était ce chemin que j’ai pris pour me démarquer et me faire remarquer.”
Propos recueillis par Anne Kerner en 2008.
Image, photo Christine Barbe